Newsletter FastCarb – Septembre 2018
Actualités du projet de recherche FastCarb
Le mot du Directeur et du Président
Le béton de ciment portland n’est utilisé que depuis 200 ans mais en cette courte période par rapport à l’histoire de l’humanité, il a permis le développement extraordinaire de la civilisation moderne en étant présent dans nos logements, nos voies de communication, nos écoles, nos hôpitaux, et notre approvisionnement en eau. De même qu’il a été associé à tous les développements de nos sociétés industrielles, de même il est un des matériaux indispensable à la transition énergétique : sans béton, pas d’éoliennes, pas de barrages, pas de bâtiments thermiquement efficaces, pas de densification urbaine, pas de transports de masse.
Cependant le béton n’a pas une empreinte carbone nulle car même s’il est composé pour environ 85% de produits naturels issus de l’écorce terrestre, il contient environ 15% de ciment ou de produits hydrauliques qui contribuent à son empreinte carbone.
Le challenge posé à tous les acteurs de la filière béton est donc de réduire l’empreinte carbone du béton afin d’accompagner la transition énergétique sans effets contraires sur le réchauffement climatique, tout en améliorant la qualité des granulats de béton recyclé, favorisant ainsi l’économie circulaire.
Pour atteindre la neutralité carbone, de nombreux projets sont en cours dans les industries du ciment et du béton : amélioration de l’efficacité des procédés, utilisation de combustibles issus de la biomasse, oxycombustion, séparation directe, captation et utilisation du CO2, recyclage et carbonatation accélérée du béton. La neutralité carbone du béton sera le résultat des mesures spécifiques aux industriels de la filière béton et de toutes les contributions de ce matériau à la transition énergétique. Dans ce cadre, l’industrialisation de la carbonatation accélérée du béton est une voie particulièrement prometteuse car le béton a le potentiel de (re)capter le CO2 émis lors de la décarbonatation du calcaire.
Lancé avec le soutien du Ministère de la transition écologique et solidaire, le projet FastCarb rassemble maintenant plus de 20 partenaires autour de l’objectif commun du stockage de CO2 dans les granulats de béton recyclé, et plus généralement dans le béton dans un but de diminution de l’impact gaz à effet de serre des constructions en béton. Une autre retombée positive sera de favoriser l’économie circulaire appliquée au béton par l’amélioration apportée aux performances des granulats traités.
Pour répondre à ces problématiques, le projet FastCarb veut étudier en laboratoire mais aussi sur site réel le process de carbonatation accélérée. Le projet est organisé comme un projet national coordonné par l’Irex en ce qui concerne le mode d’adhésion et la gouvernance. Une demande de labellisation auprès du comité d’orientation pour la recherche appliquée en génie civil (RAGC) est en cours.
L’objectif de cette première lettre est de vous donner des nouvelles de l’avancement du projet. Vous trouverez aussi régulièrement sur le site web des informations sur le projet. Bonne lecture !
Jean-Michel Torrenti, Directeur du projet FastCarb
Raoul de Parisot, Président du projet FastCarb
Carbonatation en laboratoire
Une première étude intitulée « Effet de la teneur en eau sur la cinétique de carbonatation des granulats recyclés » est réalisée dans le cadre de la thèse de Marie Sereng à l’Ifsttar. Elle a permis de mettre en place un nouveau protocole de carbonatation accélérée à l’échelle du laboratoire, sous 100% de CO2, nommé « protocole de carbonatation accélérée statique » (figure 1). La fixation du CO2 dans les granulats est obtenue par un suivi de masse.
Dans une première étude paramétrique, les échantillons de granulats recyclés de fraction 1-4 mm (issus d’un lot PN Recybéton) ont été préparés à différentes teneurs en eau et soumis au protocole de carbonatation. Le maximum de fixation de CO2 a été obtenu pour une teneur en eau voisine de 7% (figure 2). Les résultats confirment le rôle majeur de la teneur en eau dans le phénomène de carbonatation accélérée.
En parallèle, la carbonatation lors de l’écoulement dans un tambour en rotation horizontale est étudiée dans le cadre du post-doctorat de Glaydson Simoes dos Reis à l’Ifsttar. Pour ceci l’équipement micro-Deval a été adapté de manière à pouvoir injecter une quantité de CO2 une fois les granulats introduits dans le tambour. Des premiers essais ont été réalisés pour une vitesse de rotation habituelle de l’équipement (100 tours/min) et à la pression atmosphérique sur des gravillons 10/20 obtenus par concassage de morceaux de bétons concassés antérieurement. Plusieurs paramètres sont étudiés sur l’efficacité de la carbonatation : la pression partielle en CO2, la durée de l’essai, la teneur en eau des gravillons et le taux de remplissage du tambour avec des gravillons. Selon les premiers résultats, le maximum de carbonatation a été obtenu à des valeurs de teneur en eau des gravillons similaires à celles obtenues avec l’essai statique. L’influence du taux de remplissage s’avère également significative. L’effet de la rotation est très important par rapport à un essai de référence sans rotation. Néanmoins, dans les durées étudiées (1 à 3 jours) la profondeur de la carbonatation reste limitée. Une carbonatation très prononcée est surtout observée sur les particules fines crées lors du mouvement granulaire. Des essais sont en cours pour mieux quantifier les phénomènes en jeu.
Figure 1 : Dispositif de carbonatation accélérée statique
Figure 2 : Effet de la teneur en eau sur la capacité de fixation du CO2 (100% CO2, GR 1-4 mm)
Modélisation
En parallèle des expérimentations en laboratoire du GT1.1, le GT1.2 s’intéresse à la modélisation de la carbonatation accélérée des granulats de béton recyclé (GBR). Il s’agit de mieux comprendre les mécanismes de carbonatation pour en optimiser le procédé et maximiser le piégeage du CO2 par les GBR. S’il existe de nombreux modèles de prédiction de la carbonatation du béton, très peu ont été appliqués à la carbonatation d’un milieu constitué de GBR.
Après un recensement des modèles développés par les partenaires du projet Fastcarb, le GT1.2 débute son programme d’étude par un benchmark qui permettra de comparer les différents modèles et d’évaluer leur applicabilité à la carbonatation des GBR. L’organisation du benchmark est prise en charge par N. Jacquemet, chercheur indépendant. Participent au benchmark : le CERIB, le GeM (Université de Nantes, CNRS), l’IFSTTAR, l’IRC (ESTP), le LaSIE (Université La Rochelle, CNRS), et le MTES. Les résultats du benchmark seront analysés pour novembre 2018.
Démonstrateurs industriels
L’ambition du projet est de valider la faisabilité industrielle des procédés de carbonatation accélérée en cours de développement.
Deux voies principales seront explorées, l’une concerne une exposition statique (Conteneur étanche) des GBR aux gaz de cimenterie riches en CO2, SO2 et NOx ; et l’autre concerne une exposition dynamique (tambour rotatif) des GBR aux gaz de chaufferie industrielle, sensés êtres moins chargé en SO2.
Au préalable, des essais en laboratoire de carbonatation accélérée de granulats recyclés industriels avec des compositions typiques de gaz de cimenterie (15% de CO2) ont permis de recueillir des informations sur les taux et la vitesse de carbonatation en fonction de la granulométrie du granulat recyclé (sable ou gravillon). Les résultats indiquent que l’on peut espérer des temps opératoires de l’ordre de 4 à 6h, sous réserve du maintien de la teneur en humidité dans ses valeurs optimales. Par ailleurs, le calage du potentiel de carbonatation sur des bétons de laboratoire à base de ciments différents (CEM I 52,5; CEM II/A-LL 42,5R et CEM III/A) est en cours.
Le choix des dispositifs (technologie de type conteneur étanche simple et pré-existant ou bien encore réacteur de carbonatation accélérée de type tambour rotatif incliné), des sites (cimenterie et plateforme de recyclage disposant d’une chaufferie) et des matériaux (origine des granulats recyclés) est en cours de finalisation.
Parallèlement, une étude bibliographique est aussi menée pour évaluer le potentiel de carbonatation des roches pures constitutives des granulats.
Workshop international CO2STO 2019
L’Ifsttar, avec le soutien de l’AUGC, de l’Ecole française du béton, de la fib et de la Rilem, organisera du 24 au 26 juin 2019, le workshop CO2 storage in concrete (CO2STO2019). Cette manifestation rassemblera les chercheurs travaillant actuellement sur la question du stockage de CO2 dans les bétons que ce soit naturellement ou dans les granulats recyclés et permettra de confronter les idées et de présenter les premiers résultats du projet FastCarb. L’appel à résumé est ouvert jusqu’au 31 octobre 2018. Plus d’information sur le site du workshop.
Le projet est :